L’utilisation des néonicotinoïdes augmenterait encore…
L’UNAF tentait depuis plusieurs mois, en vain, d’obtenir les chiffres concernant l’utilisation des néonicotinoïdes auprès du ministère de l’agriculture. Elle les a obtenu enfin certes partiellement suite à la saisine de la commission d’Accès aux Documents Administratifs. Ces chiffres sont alarmant et interrogent singulièrement sur les conditions de mise en place de l’interdiction européenne mais aussi sur le manque de transparence du Ministère….
Les actions de l’UNAF, celles d’association comme le rucher-école départemental du Magnerolle, de chacun d’entre nous dans le cadre de la signature de pétitions et de courriers aux élus ou de faire circuler ces informations s’avèrent à nouveau essentiels pour obtenir de manière claire et dans les meilleurs délais l’interdiction totale de ces produits.
L’assemblée nationale discutera de nouveau de l’interdiction des néonicotinoïdes à partir du 7 juin.
Pour une information plus complète de ce dossier, lire ci-dessous le communiqué de presse de l’UNAF et un article du Monde suivant :
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COMMUNIQUE DE PRESSE
Chiffres de l’utilisation des néonicotinoïdes : l’UNAF dénonce une augmentation de 31% de leur utilisation et ce, même après l’interdiction européenne partielle !
Devant le manque de transparence persistant du Ministère de l’Agriculture, l’UNAF a dû saisir la Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA) pour tenter d’obtenir des données concernant l’utilisation des néonicotinoïdes. Les chiffres enfin transmis sont éloquents… Malgré l’entrée en vigueur de l’interdiction européenne partielle de 3 substances néonicotinoïdes, leur utilisation en volume a augmenté de 31% entre 2013 et 2014 ! Une augmentation gravissime et déconcertante.
En décembre 2013, est entrée en vigueur l’interdiction partielle de 3 substances actives néonicotinoïdes (le thiaméthoxam, l’imidaclopride et la clothianidine) sur certains usages comme les traitements de semences du tournesol, du maïs ou du colza. Cette interdiction ne concernait pas le thiaclopride et l’acétamipride, deux autres néonicotinoïdes. A la suite de cette interdiction, nous pouvions donc légitimement espérer une réduction de l’utilisation des molécules partiellement interdites.
Il n’en est rien :
Substances actives (kg) |
2012 |
2013 |
2014 |
acétamipride |
6 889 |
6 708 |
7 600 |
imidaclopride |
259 580 |
269 086 |
367 821 |
thiaclopride |
53 371 |
43 529 |
116 930 |
clothianidine – thiaméthoxam |
67 226 |
68 914 |
16 119 |
1. Malgré l’interdiction européenne partielle, les volumes d’utilisation de l’imidaclopride ont augmenté de près de 100 tonnes entre 2013 et 2014 soit une augmentation de 36% en un an.
2. Les volumes d’utilisation du thiaclopride ont été quasiment triplés sur la même période. On peut attribuer cela au report des usages interdits du thiaméthoxam et de la clothianidine sur le thiaclopride. Par exemple : les maïs Cruiser (thiaméthoxam) et Cheyenne (clothianidine) ont été interdits et remplacés par le maïs Sonido (thiaclopride).
3. La baisse de l’utilisation de la clothianidine et du thiaméthoxam ne parvient pas à compenser les augmentations précitées puisque l’utilisation totale des néonicotinoïdes en volume a augmenté de 31%.
Pour Gilles Lanio, Président de l’UNAF, « C’est gravissime. Comment espérer retrouver des abeilles en bonne santé dans ces conditions ? Les apiculteurs font le constat amer de l’inefficacité d’une interdiction partielle sur la réduction des volumes de vente des néonicotinoïdes. Il faut donc se rendre à l’évidence et interdire totalement et définitivement ces produits. Il faut faire cesser la substitution d’une molécule à une autre et retourner à des pratiques agronomiques (1). Nous comptons fermement sur nos parlementaires pour entendre ce message et réintroduire l’interdiction des néonicotinoïdes lors de la 3ème lecture de la loi biodiversité. »
Rappelons que le thiaclopride au-delà de son impact sur les pollinisateurs a, selon plusieurs études, des effets de perturbateurs endocriniens et a été récemment considéré comme cancérigène de catégorie 2 par l’Agence européenne des produits chimiques. Par ailleurs, l’EFSA a identifié un effet potentiel nocif de l’imidaclopride sur le développement des neurones et des structures cérébrales chez un fœtus ou un jeune enfant. L’imidaclopride a récemment fait son entrée dans le top 15 des substances les plus détectées dans nos cours d’eau. Dans cette liste des 15 pesticides, l’imidaclopride est le seul insecticide (2).
Pour l’UNAF, les élus et le gouvernement ne doivent pas céder, une fois de plus, aux pressions des firmes de l’agrochimie, comme Bayer, Monsanto, Syngenta !
Par ailleurs, Gilles Lanio constate : « alors que les chiffres des pesticides néonicotinoïdes grimpent, ceux des pesticides plus « naturels » baissent en volume : les produits biologiques et botaniques passent de 6 337 à 2 858 et les phéromones d’insectes de 369 972 à 83 668. Erreur de chiffres ou perte d’intérêt des agriculteurs pour ces solutions alternatives ? Il faut clarifier ce point car si ces chiffres étaient réels, on déplorerait encore une fois le fossé entre les discours sur l’agro-écologie et les pratiques de terrain.».
Réticences du ministère à transmettre ces chiffres…
En décembre 2015, en vertu des règles du droit d’accès du citoyen aux informations environnementales, l’UNAF a demandé au ministre de l’Agriculture la transmission des chiffres de l’utilisation des néonicotinoïdes. Face à son silence, en février 2016, l’UNAF a saisi la CADA qui a rendu un avis favorable à la communication de ces informations le 14 avril. Le 25 mai, le ministère de l’Agriculture a partiellement transmis les données demandées par l’UNAF.
Le Ministère a mis en ligne les données transmises :
http://agreste.agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/donneesventeproduitsphytosanitaires_2011-2014.pdf
(1) Sur les alternatives aux néonicotinoïdes :
http://www.unaf-apiculture.info/IMG/pdf/commun_alternativesneonicotinoi_des_042016_vdef.pdf
(2) Sur les impacts des néonicotinoïdes sur la santé
http://www.unaf-apiculture.info/IMG/pdf/commun_neonicotinoidesetsantehumaine_042016_vdef.pdf